Marc MOINGEON


Délégué général à la Francophonie et à l’Export d’Hachette Livre



L’édition et la Francophonie



Au cours de la Biennale de Neuchâtel, plusieurs des interventions prévues vont démontrer que l’espace francophone multimédia est déjà une réalité et qu’il connaîtra un développement important.

Mon commentaire d’éditeur sur cette question pourrait se formuler ainsi :

1. Les différents supports éditoriaux et les différents médias se complètent plus qu’ils ne se combattent. Les cas de cannibalisation existent, mais à la marge.

2. La création, qu’elle soit multimédia ou papier, fait souvent appel aux mêmes outils (les bases de données) et aux mêmes savoir-faire.

3. L’espace francophone multimédia devrait donc se développer harmonieusement ou concomitamment avec les autres médias.

La situation actuelle ne le permet que partiellement et elle présente de sérieux déséquilibres : tel est le sujet de mon exposé.

Le « paysage éditorial francophone » est caractérisé par un déséquilibre croissant entre le « Nord » et le « Sud ».
Le Nord connaît une démographie stagnante avec une édition forte.

Le Sud verra une démographie croissant rapidement, mais l’édition y est faible.
Le ratio des populations francophones du Nord et du Sud tend vers le 50-50, et l’édition du Nord représente plus de 95% de l’édition francophone totale.

Ce déséquilibre apparaît encore plus voyant si on compare le poids respectif de l’édition francophone et celui de l’édition anglophone : alors que le bassin anglophone est environ cinq fois plus peuplé que le bassin francophone, l’édition anglophone est dix fois plus lourde que l’édition francophone.
Cet état de choses fait peser une menace sur la pérennité d’une langue française de référence : sans un nombre suffisant de livres, on assiste au risque de l’émergence de « français oraux » divergeant plus ou moins par rapport au français de référence.



Les causes de cet état de choses :

– Insuffisance de l’investissement dans l’édition du Sud.
– Rôle excessif et inadapté des États.
– Rôle insuffisant ou insuffisamment clairvoyant des éditeurs du Nord.
– Faiblesse des réseaux de distribution, etc.



Les mesures préconisées :

– Développer l’édition du Sud en commençant par l’édition scolaire et en développant ensuite les autres secteurs de l’édition.

– Développer des partenariats Nord-Sud, Sud-Nord ou Sud-Sud dans les domaines de l’édition et de la distribution.

– Sensibiliser à cette situation les parties prenantes : États, Agences francophones, éditeurs, ainsi que les bailleurs de fonds qui jouent un rôle d’une importance croissante (Banque mondiale, Banque africaine, asiatique et interaméricaine de développement).

[M. Moingeon a souhaité ne voir publier que le résumé de son intervention]

A la Une

 La culture suppose l'enracinement, la profondeur et la perspective d'un épanouissement sans cesse en progrès. 

Jacqueline de ROMILLY

Présidente d'Honneur de la Biennale de la langue française (2002-2010)

Dans Le Trésor des savoirs oubliés, éditions de Fallois, 1998, p. 93