Débat
Jacques Chevrier Université de Paris
Je voudrais poser d'abord une question un peu technique à M. Zoungrana sur cette association qui travaille pour les enfants. À Ouagadougou et dans d'autres régions du Burkina, son association entretient-elle un partenariat avec les troupes de théâtre, parce que, au Burkina, plusieurs troupes s'inspirent d'un théâtre populaire qui a vu le jour au Brésil et qu'on appelle le théâtre forum ou le théâtre d'intervention , dans lequel les comédiens font participer le public à la représentation ? Ce théâtre forum est un théâtre politique, un théâtre engagé. Vous avez parlé à plusieurs reprises d'engagement et je sais qu'à plusieurs reprises les pièces de théâtre portaient sur des problèmes de société et des problèmes de santé pour inciter, par exemple, les parents à vacciner, quand il en était encore temps, leurs enfants contre la poliomyélite qui fait des ravages en Afrique. Or, très souvent, il y a des blocages parce que les gens sont sous l'emprise des guérisseurs, des marabouts, des traditionalistes, qui s'opposent à ce progrès. Je pense notamment à l'ATB, l'Atelier Théâtre Burkinabè qui, à plusieurs reprises, a monté des spectacles autour de ces problèmes de santé, d'hygiène, ou autour des problèmes de polygamie, avec la volonté de limiter les naissances dont vous nous avez dit que, très souvent, elles se soldent par une mortalité qui nous effare en Occident. Ce''st ma première question.
Ma deuxième réaction concerne la Roumanie. Il se trouve qu'on m'a fait l'amitié, il y a quelques années, de m'inviter à Deva. En écoutant Gabriela Marcu et en voyant ses images, je trouve son intervention pathétique, parce quelle semble dire que progressivement la France se désintéresse de ces initiatives. Tout ce qui est fait est magnifique. Ce serait peut-être j'anticipe sur le développement de la biennale le lieu, dans nos vœux, non seulement de manifester toute la sympathie que tout le monde éprouve vis-à-vis de vos initiatives très courageuses car vous travaillez dans un contexte extrêmement difficile. Il nous appartiendra de faire pression sur les autorités qui ont en charge la francophonie en France pour que des crédits soient débloqués, que des actions soient entreprises. Selon Jean Souillat, il semblerait que même TV-5 ne parvienne plus en Roumanie. Ces restrictions budgétaires sont à la fois scandaleuses et pathétiques. Votre exposé nous a conduit au cœur de votre association et au cœur de Deva.
Marius Dakpogan, Bénin
Les trois intervenants ont abouti, peut-être de façon différente, à la même conclusion. Nous menons tous un même combat. Le combat de nos peuples africains contre la misère. Le combat pour la promotion de la langue française. Pour ce qui nous concerne en Afrique, à quoi servirait une langue française que nous porterions à bout de bras si, par-ci, par-là, partout existent des foyers de tension, de misère, de sous-développement et de manque ? Je crois que la littérature et les discours politiques sur la francophonie doivent enfin cesser. Diminuer et cesser pour que les autorités françaises, si elles veulent bien que la langue française continue son rayonnement, puissent effectivement agir en faveur de leur langue. Nous autres, que l'on appelle dans nos pays des francophiles, qui portons le français à bout de bras, sommes de moins en moins nombreux. Les motivations sont ailleurs, et peut-être que, quand nous allons abandonner ce combat, les autres s'occuperont bien moins du développement de la langue française que de la lutte pour leur survie.
Christian Brisebois-Rondeau, Canada
J'aurai une question relative aux propos de Mme Bassolé qui ne se considère pas comme faisant partie intégrante du mot homme avec un H majuscule. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus : il y a beaucoup de réformes dans la langue française comme le mot aveugle qui a été remplacé par non-voyant . La langue française étant surtout particularisée par le fait qu'il n'y a pas vraiment de neutre, considérez-vous qu'utiliser le masculin comme remplacement du neutre peut être considéré comme un acte sexiste faisant partie intégrante de la langue française ?
Angèle Bassolé
Je ne me sens pas incluse dans ce grand H , parce que pour moi, le terme est trop général. Les problèmes que nous avons en Afrique et particulièrement le combat des femmes viennent justement de ce qu'on nous inclut toujours dans cette masse-là. C'est un labyrinthe. En mettant l'accent sur ce qui nous est propre et particulier, on peut arriver à pointer du doigt ce qui fait problème et trouver une solution; mais quand on parle de masse, on ne voit plus le problème. Pour dire droits de l'homme , on emploie souvent le terme humain qui peut parfois porter à confusion parce que le mot dérive de l'anglais human rights . Il peut y avoir une connotation sexiste quand, même sil y a cent femmes et un petit garçon, la grammaire dit ils et non elles En France, le débat portait sur le genre du mot ministre. Historiquement, l'emploi du féminin dans les titres ne se faisait pas parce que les femmes n'occupaient pas ces postes; maintenant quelles les occupent, pourquoi ne pas féminiser ? Pour écrire ma thèse, j'ai été confrontée à des gens de mon jury dont certains ne voulaient pas que j'utilise le mot écrivaine . Je l'ai quand même utilisé au lieu de femmes-écrivains , écrivains-femmes , mots lourds et longs. Je me rends compte que le mot commence à être accepté. Il faut oser.
Herman Zoungrana
M. Chevrier voulait savoir si mon ONG a des liens de partenariat avec des troupes de théâtre à Ouagadougou. Effectivement, nous utilisons beaucoup le théâtre, parce que c'est un des meilleurs moyens pour informer, sensibiliser et éduquer la population.
Premièrement, nous travaillons avec l'ATB, comme vous lavez souligné, et avec des troupes comme Génération 2000, que M. Konseiga connaît bien, qui sont financées par notre ONG et qui montent des sketches sur les thèmes que nous jugeons importants et sur lesquels on veut qu'ils apportent l'information à la population.
Deuxièmement, nous créons également des troupes dans les écoles primaires, dans les lycées, dans les collèges, et les enfants montent eux-mêmes des sketches, font le tour du village et informent les parents. Nous avons même, il y a trois ou quatre ans, expérimenté un petit projet dans les écoles primaires, en essayant, dans chaque classe, d'avoir les trois pouvoirs : les députés, les ministres et les juges. Dans la classe, le législatif vote les lois de la classe les enfants eux-mêmes votent leurs lois ... ceux qui arrivent en retard doivent arroser dix arbres, etc. et les affichent. Les ministres sont chargés de l'équité des décisions prises et les juges sont appelés à trancher auprès des enfants qui ne respectent pas les lois qu'ils ont eux-mêmes votées. Même quand le maître n'est pas là, ils sont auto-disciplinés, parce que ce sont des règles qu'ils ont votées eux-mêmes. Ils les suivent mieux que celles qu'on leur enseigne. Dès le bas âge, on apprend à l'enfant que même en haut de l'État il y a ces trois pouvoirs dans le système national : les députés, les ministres et les juges avec leurs tâches respectives.
Nous utilisons le théâtre comme l'un des meilleurs moyens d'intervention, notamment en milieu scolaire.
Constant Agbidinoukoun, Bénin
Je vous remercie les uns les autres pour la pertinence de vos propos. Je voudrais surtout insister sur le fait que les ONG surtout en Afrique sont jeunes. C'est dans le sillage de l'avènement de la démocratie qu'on a commencé à parler d'ONG. Elles ne sont pas encore assez expérimentées et, de plus en plus, on les voit comme représentatives de la société civile. Le gros problème que nous avons aujourd'hui, dans nos pays, c’est de savoir comment gérer de façon équitable et sérieuse les ressources humaines et les ressources financières; parce que la plupart des ONG n'ont pas de moyens financiers. Il serait bon de savoir quel genre de coopération vous avez avec les autres ONG, par exemple en Europe ou dans d'autres continents, parce que nos États ont souvent démissionné et qu'on ne peut pas défendre les intérêts, les droits des enfants comme vous le faites bien sans passer par la défense des droits des femmes. Ce sont surtout les femmes qui s'occupent des enfants. Mais si les femmes sont majoritaires, dans nos pays à 52%, 99% de ces femmes ne savent ni lire, ni écrire. Et l'alphabétisation n'est plus un domaine dans lequel excellent nos États. Il faut donc inclure dans notre activité l'alphabétisation des femmes car l'analphabétisme continue, de jour en jour, malgré les fonds et toutes les actions entreprises. J'aurais aimé savoir quel genre de coopération vous avez avec d'autres ONG. M. Chevrier dit qu'il faut utiliser tous les canaux de communication, que le théâtre est le meilleur outil et surtout dans les langues nationales.
Autre question. De plus en plus d'ONG deviennent des canaux du pouvoir politique, ce qui est grave. Une ONG travaille à la base, mène des actions concrètes qui représentent un rempart contre l'ignorance. Mais l'ignorance s'accroît, aujourd'hui, dans nos pays. Comment se situe votre ONG au niveau national ? Les droits des enfants, c'est surtout, aussi, la lutte contre les maladies infectieuses : diphtérie, typhus, tuberculose qui tuent beaucoup d'enfants en Afrique. Êtes-vous représenté un peu partout au Burkina ? De quels moyens disposez-vous ? Quel genre de coopération avez-vous avec d'autres ONG ? Une ONG ici, l'AFIDES m'a beaucoup plu et j'ai suivi plusieurs de ses émissions : Vision mondiale, qui fait un travail énorme en Afrique.
Alain Landry
M. Zoungrana va répondre et ensuite le secrétaire général de l'AFIDES, Richard Charron, Théodore Konseiga et le professeur Tétu.
Herman Zoungrana
J'aurais dû présenter les activités de notre ONG, nos domaines d'intervention au Burkina Faso. Notre ONG est constituée de près de deux cents personnes, mais notre domaine d'intervention, au départ, était seulement l'enfant, par des actions d'appui direct, des bourses, l'appui scolaire, etc., mais comme vous l'avez si bien dit, on ne peut pas travailler pour l'enfant en ignorant le milieu immédiat dans lequel il évolue : la famille. Dans nos activités, nous avons l'éducation, la santé, et depuis deux ou trois ans , la promotion de la femme et la protection de l'environnement. En prenant particulièrement le domaine de la femme, en 1999, un projet nous a permis de voyager dans les villages de plusieurs provinces pour avoir des causeries / débats avec les chefs des villages et surtout les hommes, parce qu'il y a toujours, au Burkina Faso, des villages où c'est l'homme qui détient la carte d'identité de la femme. Certaines n'en ont pas. Ces femmes ne peuvent pas participer à la gestion du pouvoir car elles ne peuvent pas voter. Nous avons d'abord sensibilisé les femmes et les hommes à ce qu'ils laissent les femmes exercer leur citoyenneté. C'est-à-dire d'abord acquérir cette pièce-là pour participer à la gestion du pouvoir en envoyant la personne qu'elles veulent à l'assemblée etc. Nous avons quand même pu mobiliser tout le système judiciaire. Au lieu que les femmes se déplacent pour obtenir leurs papiers en ville, nous avons déplacé les policiers, les agents sociaux dans les villages et financé tous les frais liés à l'établissement de ces pièces. En l'espace d'une semaine, on a établi plusieurs milliers de pièces pour les femmes. À présent, nous avons des actions comme les moulins dans les villages, les forages, etc. Ces actions ne vont pas directement aux enfants, mais concourent à leur bien-être à travers l'appui au développement du cadre immédiat dans lequel ils évoluent.
Concernant les rapports que notre ONG entretient avec les autres ONG au Burkina Faso, plusieurs réseaux existent notamment des réseaux qui permettent de relier entre eux les hommes. Nous avons plusieurs cadres de concertation et les ONG se retrouvent selon les domaines d'intervention: celles qui travaillent pour l'enfance directement, celles qui travaillent pour l'environnement, pour la femme, pour la santé. Il y a des cadres, des coalitions nationales constituées en fonction des affinités et l'ABSE à la biennale passée, j'étais intervenu pour un réseau africain que notre ONG était en train de former : le REP, le réseau électronique ouest africain des partenaires du développement de l'enfant, qui est en projet et qui se donne pour mission de regrouper l'ensemble des ONG ouest africaines et d'utiliser, justement, les nouveaux médias pour partager l'information parce qu'il n'y a pas de raison que les ONG ne puissent pas profiter des avantages de l'Internet, gagner du temps, communiquer plus facilement. Ce sont là nos ambitions pour qu'en 2001 il y ait effectivement un cadre ouest africain qui regroupera l'ensemble des acteurs qui interviennent pour le bien de l'enfant. Enfin, vous m'avez interpellé sur la politisation des ONG. D'après son statut, l'ONG, quand elle est créée, est apolitique, laïque, à but non lucratif, mais concrètement, sur le terrain, on se rend compte que plus vous voulez émerger et plus le pouvoir veut vous étouffer à cause du rôle de pression, de plaidoyer, de lobbying que les ONG doivent remplir. L'État voit en l'ONG un concurrent qui pourrait demain lui forcer la main pour prendre une décision politique en sa défaveur. Si l'État n'arrive pas à bloquer le processus, il s'agit pour lui de mettre des gens à l'intérieur qui pourront contrôler, au besoin, en fonction de son intérêt propre. Mais des ONG sont intègres, comme c'est le cas au Burkina Faso où certaines se battent pour garder la ligne qu'elles se sont fixée au départ, c'est-à-dire intervenir pour le plus de cibles précises. Mais l'État peut, à travers son financement, vous forcer à suivre la ligne qu'il veut car les ONG n'ont pas d'autonomie financière.
Angèle Bassolé
Pour l'alphabétisation; vous avez parlé de priorité. Mais une erreur se commet sur le terrain, de croire que la seule alphabétisation valable est celle qui se fait en français. Au niveau des ONG, ou des intervenants des instances francophones, ou des autres décideurs politiques, on néglige les femmes qui sont de réels diffuseurs d'information. Ne pas utiliser les langues nationales, par exemple, pour diffuser l'information, pour faire passer un message au niveau de la santé, etc., c'est croire que seul le français est valable et que l'alphabétisation dans les langues africaines va faire reculer le français. Il faudrait revoir cette problématique.
Richard Charron, secrétaire général de l'AFIDES l'Association francophone internationale des directeurs d'établissements scolaires
LAFIDES est une ONG dont le siège est ici à Montréal, mais qui a des sections nationales dans une quarantaine de pays. Je veux remercier les organisateurs d'avoir mis à l'ordre du jour de cette rencontre l'engagement des ONG dans le développement de la francophonie et dans le développement de la jeunesse. C'est un élément essentiel qu'on doit traiter à la fois, comme le disait Herman Zoungrana, localement et globalement. Au niveau global, on assiste actuellement à un renouvellement des relations entre la société civile et la francophonie, piloté par certaines ONG et en même temps par les instances francophones. Le secrétaire général de la Francophonie, M. Boutros Boutros Ghali, a déjà lancé un message très clair en disant que les ONG constituent la clé de voûte de la francophonie car elles incarnent tout à la fois son passé, sa mémoire, mais aussi son avenir. C'est une responsabilité très lourde qui est placée sur les épaules des ONG que nous voulons assumer, mais les autres instances francophones ont décidé aussi de donner davantage d'importance à la société civile en francophonie. Lors de la dernière rencontre des organisations internationales à la Conférence de Québec, une résolution qui sera transmise au Sommet de Beyrouth va demander à la Francophonie institutionnelle d'accorder davantage d'importance à la société civile en francophonie. On peut déjà prévoir une augmentation de son influence. L'exemple du Symposium de Bamako est assez porteur. La société civile y a joué, peut-être pour la première fois, un rôle de première importance et on peut prévoir une plus grande participation des ONG à l'orientation, à la réalisation et à l'évaluation de la programmation francophone. Alors je me réjouis de cette idée de création d'un réseau d'ONG dans le secteur des droits de l'enfant en Afrique. Déjà un site vient d'être créé qui essaie de donner un portail aux organisations non-gouvernementales francophones, est financé et hébergé par le site de la francophonie. Le site s'appelle OING Organisations internationales non-gouvernementales www.oing.francophonie.org . On y retrouve toutes les informations pertinentes sur le réseau actuel des ONG francophones avec une invitation à toutes les ONG de se joindre au réseau pour qu'on puisse de plus en plus travailler ensemble car la concertation des ONG et le partage de leurs ressources est primordial. Nous sommes dans tous les pays en difficulté de financement. Mais nous pouvons nous donner des moyens pour aider d'autres ONG. Déjà des groupes de nouvelles ONG ont été créés sur le site et toute ONG qui veut faire connaître aux autres ONG membres du réseau des informations sur ses activités, sur son existence et sur ses ressources peut le faire. C'est une invitation aux ONG à se concerter, à travailler ensemble pour assumer le rôle grandissant qu'on a à jouer en francophonie.
Bertin Dzangué, poète, comédien, conteur, Congo
Je suis membre de l'association de l'Atelier Senghor et je salue M. Jacques Chevrier parce que le président de mon association, qui est un poète très efficace, me parlait incessamment de lui. L'Atelier Senghor est un cercle de jeunes écrivains qui encadre des conteurs, des poètes et des peintres. Je travaille avec beaucoup d'ONG chez moi comme griot avec les organismes internationaux comme l'Unicef, la Croix Rouge, le PNU. J'interviens comme griot en apportant un message d'amour, de fraternité, d'information dans la lutte contre les maladies comme le sida qui touchent gravement mon pays. Il est dit que le Congo serait le pays le plus touché en Afrique centrale. Depuis deux ans je travaille avec l'Association panafricaine Thomas Sankara sur le terrain. Je travaille également avec beaucoup d'autres ONG dont je vous donnerai les adresses. Et, sur le français... quand j'étais à l'école, en classe de sixième, et que le professeur d'anglais entrait dans la classe je disais : qu'est-ce que j'aurai à voir avec l'anglais, je n'irai jamais en Angleterre. Et je n'étais pas le seul. Nombreux étaient ceux de ma génération qui le disaient, et on n'aimait pas l'anglais. Le moment est arrivé de me dire : il me faut voyager! Mais, aller en France c'est difficile, il faut plutôt apprendre l'anglais et aller dans le pays où le visa est plus facilement octroyé. Obtenir un visa est vraiment un problème et j'aimerais, pour la politique de la langue française, qu'on ouvre des canaux comme ceux là, pour aider la jeunesse, des financements par-ci, par-là, le soutien moral.
Michel Tétu
J'ai aimé ce matin en particulier le message touchant de Gabriela Marcu. Je voudrais prolonger la réflexion de mon ami Marius Dakpogan sur le fossé qui existe entre les discours lénifiants, les belles paroles, la langue de bois de nos dirigeants, ceux des États et de la Francophonie. Heureusement il y a des ONG, plusieurs l'ont relevé, dont Richard Charron qui est plein d'espoir. Je le suis un petit peu moins quand je vois les documents que nous a montrés Gabriela Marcu tout à l'heure. Ce que je note, c'est la réaction des jeunes Roumains, mais je retiendrai davantage la réaction des jeunes Françaises que nous avons vues. D'une part, une enseignante, magnifique, a essayé d'expliquer à ses élèves l'intérêt de la Roumanie. Les étudiants ne voulaient pas aller en Roumanie parce qu'ils ne connaissaient pas la Roumanie! On sait très bien qu'on ignore la géographie en France, et que celle de la Francophonie est complètement ignorée, ce qui est encore pis! Lorsqu'on sort d'une semaine de la Francophonie et qu'on demande à une jeune Française ce qu'est la Francophonie, elle se met à parler de camembert et de vin rouge!. Voilà la Francophonie pour elle. Le recteur Michel Alliot, ici, sait bien que l'éducation nationale française a fort à faire pour développer l'enseignement de la Francophonie, mais on en a là une illustration extraordinaire et tout à fait convaincante. C'est plus qu'un fossé, c'est un gouffre entre les discours des dirigeants et la réalité sur le terrain. D'où l'importance du rôle que les ONG ont à jouer dans tous les domaines. Richard Charron parlait tout à l'heure de l'école et des enseignements secondaires, il faut en effet quon enseigne la géographie de la Francophonie et l'histoire de la Francophonie. C'est absolument urgent.
Théodore Konseiga
À écouter les trois interventions, je suis d'autant plus fondé à croire que les ONG travaillent aujourd'hui pour que demain soit la veille des solutions des femmes et des enfants dans la mesure où, dans notre société, c'est effectivement la femme qui s'occupe de l'éducation. Je me rends compte que la solution serait d'éduquer les hommes, hommes, ici, implique également les femmes. Effectivement, notre génération ne prend pas en compte suffisamment le problème de l'égalité entre les sexes dans nos familles je parle en Afrique, je parle du terrain que je connais où la femme est celle qui se lève le plus tôt, qui se couche le plus tard, et toujours pour le bien-être de toute la famille. En ville ou dans nos campagnes, ce sont les femmes qui nourrissent nos familles mais qui, malheureusement, ne sont pas perçues comme des décideurs de premier plan. Il faut que, désormais, nous-mêmes nous éduquions nos enfants à savoir que, garçon comme fille, ils ont la possibilité d'être des décideurs responsables d'eux-mêmes. Aujourd'hui, de plus en plus, on constate que ce sont nos filles, nos sœurs, qui même mariées ont la charge de leur propre foyer en plus de penser encore à leur propre famille d'origine. C'est nous, les garçons, qui avons tendance à aller plutôt vers notre bien-être personnel, non pas celui de nos mères ou de nos pères au village. Voilà qu'à travers des rencontres de biennales de la langue française on en vient à aborder des questions de société qui pourraient aider à apporter des solutions générales aux problèmes de société. J'avoue que des séances de cette nature, au sein de la Biennale, sont à encourager car elles permettent aux décideurs de penser à favoriser l'accès à la langue française partout où la francophonie essaie de voler de ses propres ailes.
Alain Landry
On pourrait dire que c'est le mot de la faim. Merci.
Je rappelle aux nouveaux biennalistes et aux plus jeunes que notre président fondateur, le professeur Alain Guillermou, qui a été un grand promoteur du français, était d'abord et avant tout professeur de roumain à la Sorbonne. Et lorsqu'il y avait des divergences de point de vue, le professeur Guillermou nous disait :
Cultivons ce qui nous unit, savourons ce qui nous distingue et évitons ce qui nous divise.
Quelle belle philosophie !